Archives de l’auteur : Manon

Les statues de l’APHP

Bon. Il y a souvent des statues dans les Hôpitaux. Moi je traîne beaucoup dans les Hôpitaux parisiens. Pour l’instant je voulais vous montrer deux statues que je trouve bien curieuses mais doit y en avoir d’autres. Toujours pareil, n’hésitez pas à m’écrire pour que je rajoute vos trouvailles ! La première c’est à l’Hôpital Cochin. Elle est un peu cachée derrière la cafét’ dans la cour, donc on ne la voit pas tout de suite. Je n’ai pas trouvé d’écriteau qui donne une explication. Non mais vous avez vu la bête ?! Moi ça m’évoque « ma petite Manon avec tes maladies incurables voilà comment tu vas finir, bien croustillante ». On dirait qu’elle a grillé au soleil. Une petite odeur de barbecue presque. Une odeur agréable donc. Je me demande qui a décidé de mettre cette statue là et pourquoi ? Donner du courage aux patients ? Les démotiver direct (plutôt ça !) ? Rassurer les médecins impuissants ? Montrer que l’Hôpital ne sert à rien ? Franchement, ça mérite des explications s’il-vous-plaît Monsieur Le Directeur de l’hôpital Cochin !

Deuxième statue. Hôtel Dieu. Ou Hôtel d’yeux. Ceux qui connaissent ont compris ! A l’Hôtel-Dieu il y avait un service hyper pointu en ophtalmologie et urgences ophtalmo. Il a été transféré à Cochin. Je n’ai pas encore testé ce service à Cochin. En tout cas voilà, à l’Hôtel-Dieu, parmi les colonnes aux chapiteaux soignés, parmi les arcades harmonieuses et rigoureuses, trône en plein milieu de la cour, comme un anachronisme, « El Director », dans un accoutrement surprenant aux couleurs criardes. Pareil, aucun écriteau d’explication. Du coup, j’ai voulu me prendre en photo avec. Je lui arrivais au niveau des bottes. C’est toujours bien de lécher les bottes des gens importants. Surtout un Directeur d’Hôpital. Pour négocier une chambre seule par exemple !

Bientôt un post sur les déboires en chambre double !

Edit 2 : depuis l’écriture de ce billet, une autre statue à été inaugurée à l’hôpital Necker. Clairement, c’est Necker qui a la plus grosse.

Edit 1 : Quelques éléments du débat sur Twitter, merci à Martin Hirsch qui nous informe qu’à l’Hôtel Dieu c’est Dupuytren, mais la statue de Cochin est encore un mystère non élucidé ! L’hôpital Cochin indique que c’est l’artiste César (celui des pouces de La Défense et de Marseille) qui fait un « Hommage à Claude Bichat ». Sauf que Claude Bichat…il n’existe pas !!

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Bâiller n’est pas malpoli

Bon. On dirait pas du tout d’après la photo…. mais je sors du kinésithérapeute ! Un kiné normal, pour une cheville blessée normale. C’est drôle parce que justement ce cabinet de kiné est dans le quartier de la Rue Saint-Denis/Porte Saint-Martin, et pour ceux qui connaissent la réputation de ce quartier parisien, la photo prête vraiment à confusion !
Pour une fois mon problème de cheville n’a rien à voir avec ma maladie de système, trop bêtement je me suis tordu la cheville il y a deux ans dans la rue, ça a fait une entorse, je me suis dit : « C’est rien j’en ai carrément vu d’autres, même pas je vais chez le médecin pour ça ». Maintenant je regrette un peu. Soignez vos entorses avant qu’elles ne se chronicisent en tendinites !

Du coup, la kiné, c’est Juliette. On a environ le même âge je crois ; elle est super sympa, dynamique, optimiste sur ma guérison (enfin un problème qui pourrait guérir ! ). Du coup je suis super motivée pour ma cheville. J’ai toujours une pêche d’enfer quand je vais chez Juliette. Et puis donc, il y a un truc que j’a-dore avec Juliette : elle bâille. Mais vraiment tout – le – temps. Elle ne met même pas sa main devant sa bouche. Ça me touche quand elle bâille. On dirait un petit chat chassant sa lassitude. D’abord ça me donne envie de prendre soin d’elle, de lui dire de lever un peu le pied, au moins la cheville ! Et puis, il y a l’interprétation plus profonde. Quand elle bâille, elle me rassure. Juliette, je suppose qu’elle est en bonne santé, elle se donne à fond dans son travail, de 8h à 20h, et pourtant, elle bâille. Il n’y a pas que les malades chroniques qui sont fatigués, ouf, je suis un peu normale finalement.

Edit : Une lectrice, kinésithérapeute, nous fait partager son expérience sur le sujet du bâiller : « En effet je bâille aussi avec certaines patientes. Pas toutes. Seulement certaines. Et je leur dis en leur présentant mes excuses que c’est parce que je me détends avec elles, que je fais retomber la pression et que je me sens bien. Cela m’arrive essentiellement quand je pratique du drainage lymphatique manuel sur des patientes en traitement pour un cancer du sein ou dans les suites de ce traitement. Ce sont des moments très particuliers pendant lesquels mes mains agissent en autonomie me semble t’il, et j’écoute, je parle aussi, et je bâille, comme s’il y avait du « lâcher-prise ». Même et surtout quand les situations sont difficiles. » Merci à elle. N’hésitez pas à m’écrire également !

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Le titre de ce blog

Bon. Article un peu particulier. En fait je voulais préciser pourquoi j’avais choisi le titre « Alors comment ça va ? ». D’abord, il faut rendre hommage au médecin Baptiste Beaulieu (qui est toujours vivant hein), qui en plus d’être un pur beau gosse (c’est très gênant les médecins beaux gosses, on n’a pas du tout envie d’être malade devant eux), semble être un Médecin avec un grand M, et trouve encore le temps de nous faire partager son quotidien sur son blog à succès maintenant : www.alorsvoila.com. Oui alors voilà je suis fan. Du coup je voulais un nom un peu en miroir, pour, comme lui, vous raconter des petites histoires, mais de l’autre point de vue, celui du patient.

C’est marrant parce que justement en ce moment, alors que je lance mon blog, il a des petits tracas et il les raconte, je me suis dit que c’était un coup du hasard et qu’il fallait vraiment s’y mettre, avant qu’il devienne le patient drôle que je rêve d’être. D’ailleurs vous remarquerez qu’il parle de « soignants/soignés ». J’ai un doute sur « soigné ». Ça m’évoque la guérison, et souvent un malade, ça ne guérit pas. Bon mais à nouveau l’effet miroir rend pas mal, stylistiquement parlant.

Sinon, est-ce que vous avez déjà fait attention à ce que vous dit un médecin juste après le moment où vous vous retrouvez assis, face à lui, dans l’antre de son cabinet ? En général par politesse c’est lui qui commence à parler, puisqu’il est chez lui. Pas facile pour lui en fait. « Bonjour » ce serait bizarre. « Alors c’est quoi le problème ? » un brin agressif. « Alors ça va ? » pas adapté, forcément si on vient c’est que ça va pas. Je me souviens d’un, on s’asseyait tous les deux, lui sur sa grande chaise confortable « de médecin » comme on dit souvent, moi sur la chaise normale. Il posait ses mains sur son clavier délicatement comme un pianiste. Et là, regard franc, noir, pénétrant, visage lisse de toute expression, silence total, prolongé, puis bim, mouvement de tête sec de haut en bas. Les premières fois j’ai pas compris. Du coup quand je ne répondais rien il recommençait le mouvement. En fait c’était pour que je parle.

Donc au fil du temps j’ai remarqué que ma phrase de début de consultation préférée, et qui était surement plus pratique pour tout le monde, c’était « Alors comment ça va ? ». Et moi en général je commence par répondre : « Bon ».

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Les toilettes

Bon. Ça fait longtemps que j’ai envie d’écrire un truc sur les toilettes. Désolée pour ceux que ça gêne. En fait je vous comprends, avant j’étais pareille. Dans sa préface à Mademoiselle de Maupin, Théophile Gautier avait écrit : « Il n’y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid, car c’est l’expression de quelque besoin, et ceux de l’homme sont ignobles et dégoûtants, comme sa pauvre et infirme nature. L’endroit le plus utile d’une maison, ce sont les latrines. » Voilà. C’est exactement ce que je pensais sur les toilettes, avant. On pouvait pas mieux le dire que Théophile Gautier évidemment.
Sauf qu’en 2009, bim, maladie du tube digestif. Là j’ai compris à quoi servaient des toilettes. Combien on avait besoin d’elles, combien on pouvait les aimer, combien elles étaient utiles, combien même elle pouvaient être belles. D’ailleurs, remarquez l’homonymie avec le mot plus souvent utilisé au singulier. Du Larousse : « être à sa toilette »= action de s’apprêter en s’habillant, en se coiffant, en se maquillant. On est bien dans le concept du beau.
Grâce à la maladie, j’ai commencé à me poser un tas de questions sur les toilettes. Avec les voyages pour mon travail, j’ai remarqué que dans chaque pays voire dans chaque région, une boîte avait le monopole du design de chasse d’eau que vous allez retrouver partout, hôtels, particuliers, centres commerciaux, établissements publics. Vous avez remarqué ça ? Par exemple, à New York, c’est toujours des toilettes où les portes ne sont pas complètement étanches, on voit vos pieds, on entend vos bruits par le haut aussi, et si on est un peu curieux on peut regarder à travers les jours qui font le pourtour de la porte. Une américaine que j’avais questionnée là-dessus m’avait dit : « On a tous la même et on fait tous la même chose avec alors pourquoi se cacher ?! » Soit, vu comme ça…
Du coup mon frère m’a offert ce super livre : Toilettes du monde, de Sian James et Morna E. Gregory. Et j’ai commencé à collectionner mes photos de belles toilettes. Je vous mets quelques exemples dans la galerie photos. Si vous en avez et que vous vous voulez me les envoyer, allez-y régalez vous et faites-moi plaisir ! A travers le formulaire de contact pour l’instant…je vous rajouterai au post !
Bon. Comme aux toilettes on fait pas que caca mais aussi pipi, le grand maître de ce monde (probablement la statistique) a décidé en 2012 que j’aurai aussi une maladie du pipi, histoire de visiter encore plus de toilettes. D’un côté c’est super parce que par exemple vous êtes à Paris dans le métro sur un long trajet, là bim envie pressante, vous sortez du métro, vous rentrez dans le premier café (je pense précisément au café des Arts et Métiers, sympa et très bien situé donc !) et là au diable le désespoir, la vieillesse ennemie, vous vous trouvez face aux plus sublimes et fraîches des toilettes que vous ayez jamais rencontrées ! Alors encore une fois merci les maladies pipi-caca. Maintenant quand je pense à Théophile, je me dis que le pauvre il est passé à côté de grandes choses de la vie.

PS : Des associations qui font du super boulot sur les maladies du pipi-caca (y en a sûrement d’autres…) : Association François Aupetit, Association Française de la Cystite Interstitielle, Association Agir Ensemble Contre la Cystite Interstitielle (fraîchement créée, pleine d’idées)

 

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La lettre de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris

Bon. Là voilà. Elle s’impose là comme un trophée, celui de on ne sait pas qui d’ailleurs, seule, provocatrice, dans la boîte aux lettres. La différence de la lettre avec le rendez-vous médical c’est que vous ne savez pas quand elle arrive. Vous n’êtes pas préparé. D’un côté ça peut être mieux. En gros c’est soit un résultat d’analyse soit un compte rendu de consultation. Ce qui est marrant avec la lettre, c’est qu’elle porte autant d’émotions fermée que ouverte. D’ailleurs j’ai des lettres qui sont toujours restées fermées, rangées dans un classeur ; si je sais que c’est un CR (Compte Rendu) et que je sais globalement ce qui s’est passé, je ne lis pas. Avant j’ouvrais tout, ça se terminait souvent en petites larmes toutes-mignonnes-qui-durent-pas-longtemps-mais-quand-même-on-préfère-rigoler.

Du coup aujourd’hui c’est une lettre de l’Hôpital Cochin, le service d’endocrinologie. Celle-là ça fait longtemps que je l’attends alors je l’ouvre. L’enjeu c’est la SDHEA (allez un peu de science dans chaque post ça peut pas faire de mal, c’est la déhydroépiandrostérone sulfate, souvenez-vous, j’ai une formation de chimiste, j’adore ces petites noms farfelus ! ). J’avais fait un dosage en ville et j’étais au max du max, record explosé de SDHEA. C’était pas trop normal parce que je suis une fille, et que c’est une hormone mâle, donc par on ne sait quel process j’étais potentiellement en train de me transformer en homme (lisez cette phrase à voix haute avec une fausse voix d’homme à la fin, c’est comme ça que j’aurais voulu vous le dire). J’ai refait un dosage de SDHEA la dernière fois que je suis allée en consult d’endocrino à l’Hôpital. Et voilà, le résultat est là, la SDHEA est pas du tout au max du max du max, elle au min du min du min (c’est normal c’est la maladie), ouf je suis bien toujours malade et pas en train de me transformer en homme !

Merci la lettre de l’AP !

PS : Un article super style sur les faux positifs d’une médecin bloggueuse : http://www.jaddo.fr/2016/06/19/et-mes-fesses-elles-sont-roses-mes-fesses/

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Des os en crystal

Bon. Aujourd’hui je fais ma troisième ostéodensitométrie.

C’est un examen qui mesure la Densité Minérale Osseuse (DMO donc pour les initiés). Avec l’âge la DMO diminue, notamment chez les femmes ménopausées, qui ne produisent plus d’œstrogènes (allez aujourd’hui, c’est un peu technique). Il y a aussi des femmes enceintes chez qui la DMO diminue, ça s’appelle l’ostéoporose de grossesse. C’est pas pratique parce que souvent ces femmes cassent spontanément des vertèbres avec leur grand ventre, ou bien elles cassent des vertèbres en accouchant. Bref l’ostéoporose c’est pas cool. Ça peut être aussi associé à des maladies auto-immunes comme la maladie cœliaque.

Moi j’ai cassé une vertèbre juste en faisant du trot à cheval. Pour ceux qui ne connaissent pas le cheval, le trot c’est une allure intermédiaire entre le pas et le galop. Comme disent les médecins, on sent quand un os casse, on sent un truc pas habituel qui vient d’un coup. Là ma vertèbre ça avait fait comme une sensation de trou dans le dos, c’était un peu rigolo. Sur le moment j’ai pas du tout pensé que je venais de casser une vertèbre, ça me paraissait trop impossible, même si on avait déjà vu que j’avais une DMO faible, et que j’avais déjà cassé plusieurs côtes hyper facilement (genre un pote « Hey salut, ça va ?! ». Petite tape amicale sur le torse. Bim. Côte cassée. Outch. 6 semaines de punition. Le traitement : on ne bouge pas on ne parle pas on ne respire pas et le pire ! On ne rit pas !! Pour moi qui aime l’humour c’est la pire des punitions. Ceux qui ont déjà cassé des côtes comprennent ; les autres, je le souhaite à personne). Alors ce jour où j’ai cassé la vertèbre, j’ai continué sur le cheval. C’était génial comme cours. Du dressage niveau Galop 7. Là vous vous dites : « Mais elle avait pas genre trop mal ?! ». Ben non parce qu’à l’époque je prenais de la codéine à haute dose, pour un autre problème, donc je sentais pas trop mon corps. C’était bien ça. Cette notion de « ne pas sentir son corps ». Pensez à chaque fois que vous avez eu mal, puis quand vous avez plus eu mal. Vous avez cessé de « sentir votre corps », il vous fout la paix comme dirait Fabrice Midal. C’est trop bon.

Bref, depuis cette fracture spontanée de vertèbre, les médecins me font vivre comme une nonne. En théorie je ne devrais plus faire de cheval à cause du risque de chute mais j’aime trop ça. Par contre je ne m’assois plus au trot ou au galop, je suis toujours en équilibre sur les étriers. Du coup j’ai des quadriceps et des adducteurs en béton ! Je ne porte rien de trop lourd. Imaginez la frustration quand les petits gosses trop mignons de vos amis vous supplient de les prendre dans vos bras. Ou que vous partez en vacances et que vous rêvez de faire une baignade à cheval à cru (= sans selle, nos fesses directement sur le dos de la bête) mais que vous avez peur que toute votre colonne y passe. Parce que souvent les vertèbres ce sont des fractures « en chaîne », c’est joli comme expression hein ? Je m’imagine jouer aux dominos quand je prends des enfants dans mes bras du coup. Cassera, cassera pas ? Comment je lui explique à la petite Louise que ce serait quand même bien qu’elle se hisse toute seule sur les toilettes à 3 ans parce que tatie Manon elle pourrait y laisser gros. Elle s’en tape elle. Elle vit sans stress. J’adore les enfants pour ça. Du coup je rêve d’en avoir. Mais j’attends que peut-être les médicaments pour les os fassent remonter ma DMO…et je fais des ostéodensitométries tous les ans pour savoir où j’en suis de pouvoir réaliser mes rêves…

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La récompense

Bon. Chaque fois que je vais chez le médecin et que c’est un peu pénible, je m’offre une petite gourmandise juste après. Là c’est un moelleux au chocolat bien fat. Je me dis que les boulangeries près des hôpitaux doivent faire vachement plus de bénéf que les autres. #LeKifDeLaMaladie

La meilleure récompense que j’ai eue : le moelleux au chocolat du fournil d’Ornano, 80 boulevard Ornano, Paris 18ème. Photo non contractuelle, ils les font ronds, et les parts sont énormes !

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Le droit d’être fou

Bon. Aujourd’hui je suis allée chez la psychiatre du centre antidouleur. On se connaît depuis 5 ans maintenant. Pour moi, elle est l’incarnation de Dieu, en médecin, en femme. Dans mon éducation catholique on m’a appris qu’on pouvait ressentir des appels, avoir des apparitions. Si on me demandait si un jour j’ai eu ça, ce serait oui et ce serait elle. Elle ne juge rien, elle pardonne tout, elle est dévouée, elle est presque tout le temps de garde aux urgences – elle doit voir des « trucs de fou » – pourtant elle est toujours calme et souriante. Quand elle demande « Alors comment ça va ? » c’est avec une voix douce, un regard présent mais délicat, une certaine gêne même, la pudeur de cette question à la fois si automatique et si chargée en émotions intimes.

Je la soupçonne d’être mariée à la médecine. De vivre dans un petit appartement tout près de l’hôpital pour être disponible le plus vite possible dès qu’une urgence se présente. Dans le film Hippocrate réalisé par Thomas Lilti, l’acteur Reda Kateb dit à un moment « être médecin c’est une malédiction ». Voilà, c’est ma psychiatre. Mais en version bénédiction.

Alors aujourd’hui on parlait de mon épisode qu’elle qualifie de « subexcitation psychique » que j’ai eu il y a quelques mois, suite à une hospitalisation longue. Elle me dit qu’elle ne comprend pas pourquoi mon cerveau a réagi comme ça. Moi je lui propose : « Mais en fait peut-être qu’on a tous le droit d’être un peu fou quelques temps ? ». Elle me répond en rigolant : « C’est étonnant votre notion des droits du cerveau ! « . Du coup, je pense que ça voulait dire oui. Oui, parfois quand on n’en peut plus de quelque chose on devient un peu fou et puis ça passe. Moi je pense même qu’au fond on est tous un peu fous en fond d’écran. Même la psychiatre qui est l’incarnation de Dieu.

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Un médecin malade ?

 

Bon. Pour le premier article de ce blog, j’ai de la matière.

J’ai eu aujourd’hui une de mes plus belles consultations avec un médecin. Belle au sens de la vraie « beauté », gratuite généreuse universelle unanime évidente. On a commencé de manière classique « Alors comment ça va ? » on a discuté des traitements, prévu quelques modifications. Et là elle -la médecin- me demande : « Vous faites quoi dans la vie Manon ? » Moi : « Je suis chercheur, au CNRS, en chimie, mais encore en CDD, parce qu’au début on fonctionne beaucoup en CDD, et là actuellement je suis au chômage, entre deux contrats ». Elle : « Vous aimez ce que vous faites ? ». Moi : silence interloqué. Avant j’aimais, maintenant je ne sais plus, la pression de chercher pour trouver, la précarité des CDD, la lenteur des applications à nos recherches, les querelles d’égos entre chercheurs…je ne sais plus si j’aime. Voilà ce qu’il y a eu derrière mon silence. Elle : « De toute évidence vous devriez être médecin. » Et bim.

Elle a tapé dans le mille. En plein dans ce désir qui me tiraille depuis quelques années maintenant, depuis que je suis malade, depuis que je vois comme ça peut être beau d’être médecin, depuis que je vois comme un corps humain c’est un bordel immense à gérer, surtout quand ça déconne, mais à quels beaux défis le médecin est confronté, et quelle gloire quand quelque chose marche et que la vie du patient est améliorée ou qu’il est guéri ! Voilà, je suis une patiente, avec une maladie chronique qui ne guérira jamais, et j’ai envie de vous écrire avec cette matière. Avant je disais que je n’aimais pas les médecins ni la maladie. Maintenant la maladie par sa perfidie me fascine, le médecin par son courage me rend envieuse. Et je veux vous raconter !

PS : Sur la photo, un copain que j’ai connu en hypokhâgne (donc oui oui en lettres) et qui a fait la passerelle après être entré à l’ENS Ulm pour devenir médecin. Il est maintenant interne en psychiatrie. Il sera un beau médecin ! Je lui ai coupé la tête pour faire plus poétique.

PPS : Pour des lectures sur le médecin malade, un rapport de l’Ordre de Médecins (2008) et la thèse de Sandra Bonneaudeau : Le médecin/malade : un patient comme les autres ? (2011)

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