Mon syndrome de Stockholm

Bon. J’étais à l’hôpital pour la énième fois. Je commençais à ne plus trop aller à l’hôpital ces temps-ci, je ne faisais plus mes bilans les imageries, je boudais les « je vous envoie vers ce Cher Confrère » et patati, et patata. Ça n’était pas efficace. Je m’enfermais dans une bulle de symptômes inacceptables pour d’aucuns, familiers pour moi. Presque agréables et rassurants. Ainsi, il m’arrivait régulièrement de constater : « Tiens, je n’ai pas mal au… nez aujourd’hui ». Toutes les déclinaisons sont possibles. La maladie était devenue ma normalité.

Et puis il y a eu cette consultation avec ce Docteur.

On m’avait dit : « Si si, va voir, il y a ce nouveau Cher Docteur, très grand très compétent très fort très sympathique, il va changer ta vie. »

Il avait bien révisé avant de me voir. Je me suis dit quel fayot. Il m’a demandé depuis combien de temps je vivais dans ma bulle de malade. C’était pénible de se souvenir. Je l’ai trouvé moche. Tout ce que j’avais vécu, il l’évoquait, et toute ma souffrance passée énoncée venait cristalliser sur cet être qui bousculait impudent mon confort de malade. Il était mon geôlier. Je l’ai détesté.
Il m’a dit que tout irait beaucoup mieux même si ce serait dans un peu longtemps. Je l’ai trouvé bête. Cela fait longtemps que je ne crois plus au Père Noël.
Et puis…il a parlé longuement de nouveaux médicaments. J’ai eu une hallucination. Je n’écoutais plus. Il secouait un trousseau de clefs au-dessus de ma tête. Et je finissais par les attraper toutes, une à une.

De mon geôlier il devenait mon sauveur.
Je l’ai trouvé beau. Je l’ai trouvé très très beau.
Je suis tombée amoureuse du Docteur.

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