Ma promesse au Grand Monsieur qu’était Philippe Gourdin

« Samedi dernier, Philippe nous a quitté. »

Je lis et je relis cette phrase postée sur la page Facebook « Philippe Gourdin – Auteur » , mais je ne parviens à y croire. Philippe fait (faisait faut-il dire maintenant) partie de ces hommes et de ces femmes, qui même s’ils meurent, restent vivants dans nos esprits, tant ils étaient vivants quand ils étaient vivants.

Depuis plusieurs années, la maladie me cloue maintenant dans mon appartement. Parfois je sors, parfois non. Trop de douleurs, trop de symptômes, besoin de toilettes, pas assez de force. Alors je reste, en « pyjama ». Le soir parfois, je change de « pyjama », pour faire croire à mon cerveau que je me suis habillée dans la journée. En fait, la frontière entre mes « pyjamas » et mes vêtements de journée n’existe plus. Tout est fait de largesse et de confort, pour palier l’inconfort de la trop large maladie.

A l’époque où je n’étais pas malade, je critiquais allègrement ces pyjamards, types flemmards qui ne prenaient même pas le temps de se brosser les dents, qui osaient parler d’un rendez-vous à 14h du matin. Je les abhorrais, je les méprisais, nous n’étions pas du même monde. Dans mon corps et mon esprit régnaient la discipline du show off et de la performance, j’étais maquillée jusqu’au bout des ongles dès 8h du matin, ne fut-se que prête à ouvrir au facteur pour signer un recommandé. Ne fut-se que pour passer la journée à étudier à la maison, et me démaquiller le soir, sans n’avoir finalement croisé personne.

Je vais vous faire une confidence : cette époque me manque. Non pas l’époque où je me croyais supérieure à des congénères, mais l’époque du maquillage, l’époque du rituel de bonne santé.

J’ai lu pas mal de choses de Philippe, et d’ailleurs je vous invite à faire de même. Il fait partie de ces gens qui auraient pu devenir des Marc Levy, mais percer dans l’écriture est presqu’aussi difficile que de se maquiller le matin quand on est devenu trop malade. La phrase qui m’a le plus marquée de Philippe, c’est qu’il disait : malgré la maladie, tous les matins, je m’habille. La première fois que je l’ai lue, cela a été pour moi une révélation. Il était donc bien possible de s’habiller le matin, quoi qu’il en coûte, comme on dit aujourd’hui. Néanmoins, après cette lecture à mes yeux divine, je ne me suis pas habillée tous les jours. Parfois un peu, parfois jamais.

Aujourd’hui, j’ai appris ton décès hier, Philippe. Aujourd’hui, je suis douleur, je suis symptômes, j’ai besoin de toilettes, je n’ai pas assez de force. Mais aujourd’hui je suis habillée, maquillée. J’ai même mis des boucles d’oreilles. Et je me promets de poursuivre cet effort désormais chaque jour qu’il me restera, pour honorer ta mémoire.

Repose en paix.

Les livres de Philippe, c’est aussi ici : https://www.philippegourdin.net/

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