Enlevons nos masques ! J’ai eu le covid.

J’ai eu le covid. Quel titre con n’est-ce pas ? Qui n’a pas eu le covid ? Si si, il y en a qui ne l’ont pas eu. Enfin ils l’ont surement eu sans le savoir. Et puis c’est bon, avec le vaccin, le covid c’est devenu une grippette comme n’importe quelle autre maladie passagère.

J’ai mis du temps avant d’écrire ce billet.

Le premier test positif, c’était le 7 janvier. Je me souviens avoir regardé le chromatogramme monter avec le même stress que celui des tests de grossesse (ma maladie contre-indique très fortement la grossesse, alors contrairement à d’autres, j’espère toujours ne voir qu’un trait même si avant la maladie j’ai longtemps voulu y voir deux traits). Bref. 2 traits, super vite. Test covid, pas test de grossesse. Bon sang j’ai le covid. Je n’ai pas fait les fêtes de fin d’année, je n’aime pas ça de toute façon. Je n’ai vu aucun ami récemment parce que la maladie chronique était bruyante. Alors oui, je suis bien allée chez le généraliste, à la pharmacie, mon pain quotidien quoi. Mais masquée FFP2. Comme toujours depuis le début de toute cette mascarade. Depuis même l’époque des masques tissu, y avait cette efficacité asiatique à livrer des FFP2 (des KN95, c’est équivalent). 

Je n’y ai pas cru à ce test positif. J’ai fait un deuxième test d’une autre marque. J’avais déjà des autotests à la maison depuis l’été 2021. J’avais trouvé ça génial de pouvoir s’en procurer. Quelle chance de vivre dans un pays riche. Deuxième test positif. Je n’y ai pas cru. J’ai fait un troisième test. Troisième test positif. Bon. Il a fallu se rendre à l’évidence. Malgré toutes mes précautions, malgré toute mon envie de ne pas attraper ce foutu petit virus pourri, c’était mon tour. En bonne petite Terrienne, j’allais appartenir à cette grande famille des covidés. J’ai senti à la fois un gros choc, d’incompréhension, un grand stress, sur comment allait évoluer la maladie (parfois ça se passe mal n’est-ce pas, pour ceux qui ne le savent pas encore, je vous invite à aller regarder les chiffres, par exemple sur CovidTracker. On a encore 200 morts par jour. Un avion entier comme le disent certains si justement. Mais on s’en fout un peu. D’ailleurs je l’écris entre parenthèses. On « vit avec le virus » n’est-ce pas, c’est comme ça qu’il faut dire ? sinon on est hypochondriaque d’après notamment les journalistes de Marianne mais pas qu’eux, voilà c’est ça), et enfin, j’ai été envahie par une grande curiosité. J’allais enfin communier avec ce patient zéro dont on n’entend plus beaucoup parler, cet humain-là qui un jour s’est tapé la maladie pour la première fois, et qui sans le savoir a bouleversé la face du monde pour…tellement. 

Vous vous souvenez comme on avait peur ? Au début ? Va y avoir une deuxième crise, elle sera économique. Va y avoir une deuxième vague, elle sera psychiatrique. Des gens qui se prenaient pour Dieu ont senti le sable glisser de leurs poings pourtant bien fermés, ont vu leurs convictions les plus profondément ancrées être balayées par cette bise de virus. Y a même des dictateurs qui ont cherché à se venger en faisant la guerre. Ah la guerre, ça on maîtrise ! Et puis quoi de mieux que la guerre pour oublier le virus ? Mourir d’une bonne balle, c’est tellement plus digne que de mourrir dans de longues souffrances en faisant souffrir d’autres humains à bout pour s’occuper de vous (aka, les soignants). 

Mais je m’égare. Être atteinte de ce covid m’a fait trop réfléchir. C’est une grippette enfin. « Vous avez eu les 3 doses ? » avait demandé le Docteur. « Alors c’est bon ! Dans une semaine c’est fini et puis vous verrez vous serez rassurée de vous apercevoir que vous n’êtes pas morte. Et sinon, vous vous isolez bien ? Ah non ? Vous avez un aidant qui vit chez vous ? Ah. Mais il est en bonne santé ? Bon, ce sera une formalité pour lui aussi. Et puis ça lui donnera un pass vaccinal à durée illimitée, c’est super ! » Quelle chance de vivre dans un pays riche.

J’ai guéri du covid. Effectivement pour moi, par chance, ça a été une « formalité », même si j’ai bien morflé. En revanche, la semaine qui a suivi ma guérison, il a fallu changer d’immunosuppresseur pour ma grosse maladie. C’était attendu depuis plusieurs années. Dans plein de grosses maladies chroniques, parfois une molécule d’immunosuppresseur ne fonctionne plus, il faut en essayer une autre. Il y a aussi tous les gens greffés sous immunosuppresseurs. Bref, plein de gens. Des gens bien. Qu’on aime et tout. C’est même pas forcément visible qu’ils prennent des immunosuppresseurs. Bref, mon nouvel immunosuppresseur m’a fait attraper un autre virus, on ne sait pas lequel, des virus y en a plein. Pourtant, non si rassurée d’avoir eu la fameuse grippette, j’avais continué de garder mon masque FFP2 partout. Je suis tombée au 36ème dessous avec cet autre virus. Eh oui, je n’avais pas eu de vaccin pour cet autre virus. J’ai été faible comme jamais. Encore maintenant. Alors qu’on est déjà en mars. J’ai de la chance, j’ai un aidant, me direz-vous ? Sauf que cet aidant…cet aidant qui avait failli se voir refuser sa première dose de vaccin covid car il était « en bonne santé », puis qui l’avait finalement eue pour me protéger parce qu’il vivait avec une immunodéprimée, cet aidant triple vacciné, semble entamer un covid long. Tous les jours depuis un peu avant le 7 janvier, il souffre. Il a maintenant comme une maladie chronique. On lui a dit d’attendre patiemment 3 mois avant d’envisager un vrai covid long. 3 mois minimum pour une grippette. Ça fait cher quand même. Même quand on vit dans un pays riche.

Mais je m’égare encore, revenons-en à nos moutons ; ce virus me fait trop réfléchir. Au début de la pandémie, je me souviens de cet échange optimiste avec mon amie taïwanaise. Les taïwanais, bien que souvent titillés par des gens qui aiment la guerre parce que la guerre c’est plus simple que le covid, les taïwanais sont des gens agréablement optimistes. Ils ont connu un premier Sars-Cov, en 2002. Donc en 2020, elle m’avait dit : « Tu verras, tout le monde va s’adapter, les gens vont porter des masques en intérieur, et puis on va améliorer les systèmes de ventilation, ce sera simple quand tout le monde aura compris que ce n’est pas si compliqué à combattre. Et puis, les masques vont rentrer dans les moeurs, ce sera très bien pour l’hygiène en général, et pour les autres maladies. Et puis ça protègera les plus fragiles de la société, les aînés, les immunodéprimés. A Taïwan tu rentres à La Poste, tout le monde est masqué, depuis 2002. C’est devenu normal. » 

Comme j’avais été apaisée ce jour-là de 2020. Désormais tout serait plus sûr pour les immunodéprimés. Finalement, il y aurait eu du bon dans ce Sars-Cov épisode 2, et faudrait presque remercier le patient zéro à la fin. 

28 février 2022. France.
On n’est plus obligé de porter un masque dans les lieux intérieurs si on est vacciné.
On n’est plus obligé de porter un masque dans les lieux intérieurs si on est vacciné.
On n’est plus obligé de porter un masque dans les lieux intérieurs si on est vacciné.

Ce covid me fait trop réfléchir. Qu’est-ce qui a bugué ? Plein de vaccinés on eu le covid, l’ont transmis à d’autres, ont fait des covid long. On le sait, scientifiquement. À Taïwan, ils ont gardé tous leurs masques depuis 2002 parce qu’ils ont compris que c’était mieux. En France, y a toujours un avion de morts par jour. Y a aussi les gens immunodéprimés qu’on aime et qui sont fragilisés par leur grosse maladie initiale, ou bien qui ne répondent pas au vaccin, et qui donc occupent environ 1/3 des réanimations.

Ils occupent 1/3 des réanimations et y a encore de la place à l’hôpital ? C’est bon alors ? Mais quelle chance on a de vivre dans un pays riche. Ah, on me dit dans l’oreillette qu’on ne sort pas toujours vivant de la réanimation ? Ah bon ? Mais les médecins ne savent pas faire leur travail ? Ah, on me dit dans l’oreillette qu’on sort toujours épuisé de réanimation ? Ah bon ? Mais y a des arrêts maladie pour ça. On a de la chance on vit dans un pays riche, il faut en profiter ! 

Mais alors à Taïwan ils gardent vraiment encore leur masque en intérieur ? Depuis 2002 ? Ils sont bizarres non ? Ils sont pauvres ? Ils ne savent pas vivre. Nous, nous avons le sang chaud et les bourses pleines. On a besoin de voir des bouches qui s’ouvrent en toute circonstance. Au mépris des éventuelles maladies. On ne va quand même pas vivre dans la peur pour toujours, non ? Liberté ! C’est dans notre devise ! Je connais plus la suite. L’avion des morts tous les jours ? Ils seraient morts un jour de toute façon ! De leur maladie ou d’un autre virus ou parce qu’ils sont trop vieux. Au moins ils ne souffriront pas de leur comorbidité de base ni à l’Ehpad parce qu’apparemment il y a des maltraitances dans les Ehpad. Ça leur rend service, ils ne s’en rendent pas compte.

Retirons enfin ce masque, agissons comme des moutons quand enfin le gouvernement nous l’autorise ! Liberté, courage, et guerre ! La pandémie est enfin finie.

 

PS : je repense souvent tristement à ce grand discours du Grand Directeur de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, dont quelques mots étaient : « Together, we now have a once in a generation opportunity to prove to each other that we can be greater than the sum of our parts. » En français « Ensemble ; nous avons aujourd’hui l’opportunité unique de nous prouver à tous que nous pouvons être plus grands ensemble, que chacun de nous séparément. » Le discours en entier ici.

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